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lunes, abril 29, 2024

La Suisse devra-t-elle le restituer un jour?

CulturaLa Suisse devra-t-elle le restituer un jour?

Le patrimoine de l’Afrique noire présent en Suisse est l’un des plus riches du monde La Suisse devra-t-elle le restituer un jour?

Par Claude Chuard

Terre cuite Nok, masques fang, reliquaires du Bénin, portes de grenier dogon et bronze Sao: entre institutions publiques et collections privées, la Suisse possède plus d’une centaine de milliers d’oeuvres et d’objets ethnographiques provenant d’Afrique noire. Certes la Suisse n’est pas le pays le plus riche au monde en art africain, ses collections n’ont pas toutes le même intérêt scientifique, culturel et artistique. Néanmoins sa position est très en vue, ne serait-ce qu’au plan du marché de l’art.

Depuis quelque temps cependant, un nuage assombrit le ciel des marchands et galeristes, collectionneurs privés et même des musées. Selon ces milieux, deux conventions internationales initiées par l’Unesco pourraient, si la Suisse les ratifie un jour (lire ci-dessous), vider les étals des galeries et amputer les musées de la moitié de leurs dépôts pour rendre ces milliers d’objets aux pays d’Afrique d’où ils proviennent. Prenant leurs avances, certains collectionneurs se barricadent tandis que les plus fortunés d’entre eux n’achètent plus que les pièces à pedigree, celles dont des documents attestent la présence ancienne en Europe, en tout cas depuis 75 ans, barre fatidique pour éviter d’être un jour inquiété. A Berne, les juristes jurent pourtant leurs grands dieux que ces conventions n’introduiront jamais de rétroactivité. Le doute subsiste du côté des collectionneurs.

150 ans de pillage

En Europe et ailleurs, personne ne conteste le pillage général du patrimoine culturel auquel l’Afrique noire est soumise depuis 150 ans. La colonisation, la misère, les guerres, la corruption, tout cela additionné a conduit à la situation présente, catastrophique pour l’Afrique. Un seul exemple: en Côte d’Ivoire, impossible de montrer aux écoliers les masques les plus significatifs de leur patrimoine. Ils sont tous à l’étranger et l’écolier devra se contenter de mauvaises photos, au mieux d’Internet.

Reste qu’il ne suffit pas de reconnaître ce pillage pour retourner au point de départ. Et lequel, d’ailleurs? Les Africains eux-mêmes n’attachent pas la même valeur à ces objets que les Européens collectionnent. Ce n’est pas une question de goût, d’éducation mais de culture.

A Genève le Dr Martin Sigam, Camerounais d’origine et collectionneur attentif, anime une association qui vise à faire mieux connaître la signification des objets africains au grand public (APA). “Initialement, dit-il, ces objets ne sont pas fait pour être contemplés. C’est leur pouvoir rituel, le service que rend l’objet qui est prioritaire. Je ne dis pas que l’Africain ignore ce qui est beau. Bien au contraire, dans sa vie quotidienne, l’Africain veille à la décoration de la maison, des objets du ménage et sa notion du beau s’étend à son corps: les scarifications de la peau traduisent une recherche du beau jusque dans l’intimité de la chair. En Afrique, poursuit-il, un objet est fabriqué par et pour une ethnie et celle-ci est la seule à comprendre tous les tenants et aboutissants. Dès qu’un objet quitte l’Afrique, il se voit donc privé de sa valeur symbolique et d’un faisceau de significations.”

Le musée cannibale

Plus grave, beaucoup de ces objets, notamment les plus usuels, correspondent à un mode de vie qui, même en Afrique, a disparu. C’est là que l’ethnologue occidental perd pied. L’objet est non seulement hors contexte mais hors du temps. A Neuchâtel, Jacques Hainard, conservateur et ethnologue décoiffant, l’avoue: “Les ethnologues sont peu à peu paralysés par leurs collections.” Lui qui prépare pour ce printemps une expo sur “le musée cannibale” reconnaît ce glissement de l’ethnographique à l’esthétique. Claude Savary, son ex-collègue de Genève, dit son dépit: “les critiques d’art ont envahi le domaine ethnographique pour le vider de son champ d’activité”. A Paris, un pavillon du Louvre et bientôt le Musée des arts premiers, initié par Jacques Chirac, vont entériner ce glissement de l’authentique à l’esthétique.

Tous les gens bien intentionnés s’accordent sur la légitimité de la restitution. Mais dès qu’on aborde le moment de cette restitution et le comment, les divisions éclatent. Les plus extrêmes soulignent que la notion de musée échappe à l’Afrique (lire l’interview de J.P. Barbier-Müller). Claude Savary, ancien élève du professeur Gabus, relativise. Selon lui, le Musée de Niamey, avec ses collections, mais aussi des ateliers où les artisans venaient travailler devant le public, constituait une belle tentative de musée d’un autre genre. Hélas! l’édifice a été détruit par un incendie et toutes ses collections avec lui.

Volé, rendu et revolé

Le Nigeria disposait des plus beaux musées d’Afrique. Un dictateur, des guerres les ont réduits à l’état de squelettes. Les pièces archéologiques parmi les plus fameuses, des céramiques Ifé du XIe siècle ont été volées avec des complicités au plus haut niveau. Le scandale a même rejailli en France récemment quand on découvrit que le futur Musée des arts premiers avait acquis certaines de ces pièces. Colère à l’Unesco, malaise à l’Elysée, l’affaire vient de se conclure par un accord à l’amiable, une convention qui autorise la France à conserver ces pièces dans son futur musée pour 25 ans.

A Zurich, le galeriste et marchand A. Fiacco connaît bien l’Afrique pour y séjourner souvent. Il fourmille d’anecdotes et d’exemples, tous plus désespérants. Toutes les lois du monde n’empêcheront pas le trafic tant que l’Afrique est plongée dans une telle pauvreté, fait-il remarquer. Au Cameroun par exemple, les chefs bamiléké n’ont pas le droit de vendre les pièces de leur trésor ancien. Cela n’empêche jamais un proche du chef de subtiliser une pièce et de la vendre au touriste qui passe. A. Fiacco en a fait l’expérience et quand il est venu, accompagné de témoins restituer l’objet volé, le chef ne l’a pas accueilli à bras ouvert. Il avait raté une affaire.

Pas de paternalisme

Ce triste état des lieux, Ridha Fraoua, juriste, chef à la division 1 de la législation à l’administration fédérale à Berne, le confirme. Il connaît bien les conventions de l’Unesco, sur le trafic des oeuvres du patrimoine puisqu’il a travaillé sur le dossier Unidroit et qu’il est parfois mandaté comme expert international. Mais il estime néocolonialiste cette attitude qui consiste à dire que l’Afrique n’est pas capable de protéger son patrimoine. “Il faut leur laisser faire leurs expériences”, dit-il. Certes, convient-il, l’Unesco assume une part de responsabilité. Elle n’a jamais su donner une portée substantielle au principe d’ingérence en matière culturelle et de protection du patrimoine. En Afghanistan, par exemple, la destruction des bouddhas de Bamian par les talibans le prouve. De plus, l’inscription de certains sites au patrimoine de l’humanité n’a fait qu’aggraver le pillage. C’est pourquoi il appelle de ses voeux des interventions concertées, notamment des fouilles internationales sur des sites tel le Niger et ailleurs. Les conventions de l’Unesco ne favorisent pas une vision nationaliste du patrimoine. Dans le même temps, R. Fraoua regrette qu’en matière archéologique, les Européens ne s’intéressent qu’à des campagnes de fouilles spectaculaires ou de prestige, laissant aux pilleurs des territoires entiers.

Dans le bassin du Niger par exemple, il n’est pas rare qu’un agriculteur ou un berger tombe sur une céramique Nok du XIIe siècle qui émerge d’un tumulus. En la vendant à un intermédiaire, il pourra s’acheter du mil, son aliment de base, pour nourrir sa nombreuse famille durant un petit mois. Arrivée sur le marché de l’art européen, cette pièce se revendra entre 8000 et 60 000 francs, selon sa taille, son époque, sa qualité. Voila l’équation entre le Nord et le Sud.

Barbier-Müller: “Pas question de restituer ces oeuvres à l’Afrique aujourd’hui”

Par Claude Chuard

Au plan international, le Genevois Jean-Paul Barbier-Müller est un homme incontournable pour l’art tribal africain. Son musée genevois, ses collections (2000 pièces africaines) voyagent dans les grands musées. Il se fait aussi marchand. Ainsi a-t-il vendu 300 pièces du Nigeria à un musée parisien, bientôt fondu dans le futur Musée des arts premiers. Pour lui, il n’est pas question de restituer ses objets et il s’en explique.

-Vous êtes fortement opposé à toute restitution. Pourquoi?

-En ce qui concerne l’Afrique, il n’est que d’ouvrir un quotidien pour lire les famines, les guerres tribales, les coups d’Etat et les problèmes économiques de ces pays, à qui l’on a ordonné de s’organiser démocratiquement, notion inconnue d’un continent où le respect ne va pas à l’élu, mais à l’ancien, au sage qui a vu passer les décennies en survivant.

-Cela ne vous choque pas que le patrimoine d’un continent soit pillé?

-Il est certain que le fait que les oeuvres les plus importantes des cultures tribales africaines soient en Occident peut paraître choquant. Mais nous donnons à ces oeuvres une valeur que l’Africain ne lui attribue pas. Quand un masque est mangé des termites, on en sculpte un autre. La notion de “musée” est liée à la culture gréco-romaine. Les temples de Rome étaient des musées où l’on exposait les sculptures de Phidias arrachées à la Grèce. Cela ne nous confère pas une vertu ou des qualités particulières. C’est un fait.

-Quels sont vos motifs?

-Toute oeuvre d’art renvoyée en Afrique aujourd’hui serait en péril, et le serait inutilement. Les musées ont tous été fondés par des Européens ou par des Africains formés par nous. Ils ne correspondent à aucun besoin de la population. La préservation du patrimoine culturel de l’Afrique par l’Europe n’est pas un scandale. C’est nous qui le baptisons ainsi, car les Africains placent la pérennité de certaines valeurs ailleurs: dans les mythes transmis oralement, dans les règles fixant le comportement de membre d’une communauté.

-La restitution vous paraît donc impossible?

-Savoir à qui restituer une oeuvre est un problème auquel aucun tiers-mondiste ne pense. Les frontières des Etats africains sont celles des anciennes colonies. Il en résulte que partout, des ethnies sont coupées en deux. Au surplus, le musée est généralement situé dans la capitale. Or, celle-ci est située dans une région ethnique souvent peu appréciée d’autres ethnies. En voici quelques exemples: les Sénoufos, qui sont à cheval sur le Mali et la Côte d’Ivoire, n’aimeraient guère que leurs “trésors ancestraux” soient déposés à Bamako, chez les Bambara, ou à Abidjan, chez les Lagunaires, des Akan parents des Baoulé. Il faudrait fonder un musée à Korhogo, en pays sénoufo. Qui en profiterait?

-Vous ne croyez donc pas au retour de ces pièces?

-Les troubles permanents de nombre de pays mettent en danger les musées. Au Zaïre, le Musée de Kinshasa a reçu (restitution) de très belles pièces de la Belgique. Une bonne partie a été vendue ou donnée par Mobutu. Le reste a été pillé ou brûlé lors des troubles accompagnant la prise de pouvoir par Kabila. Au Tchad, les fouilles conduites par le couple d’ethnologues Lebeuf a débouché sur un heureux partage entre le Musée de l’homme de Paris et le Musée de Fort-Lamy. Ce dernier a été entièrement détruit au cours d’un des innombrables putchs vécus par ce pays. Même chose pour Brazzaville. Quant au Nigeria, il a revendiqué des statuettes en céramique archéologiques de Nok acquises par le Musée des arts premiers comme “biens nationaux”, alors qu’il venait de patronner une grande exposition de ces céramiques au Luxembourg, se félicitant de ces “ambassadeurs” culturels muets que les marchands et collectionneurs européens lui avaient fournis. Au surplus, tous les Etats de la Fédération nigériane situés au nord, où se trouvent les vestiges de Nok, ont adopté la charia en 2001. D’ici à ce que les statuettes subissent le sort des bouddhas de Bahmian, il n’y a qu’un battement de cils.

La source: La Liberté, 37 000 ex., Suisse, quotidien. Créé en 1871, diffusé essentiellement dans le canton de Fribourg, ce titre généraliste francophone se présente sous la forme de quatre cahiers dont le premier, consacré notamment à l’international, s’achève sur un reportage (www.laliberte.ch).

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